"Il est impossible d'écrire quoi que ce soit". C'est ainsi que débute "Une minute quarante-neuf secondes", le récit vibrant de Riss, directeur de Charlie Hebdo, sur l'attaque meurtrière du 7 janvier 2015.
Comme Philippe Lançon qui avait raconté son calvaire dans "Le lambeau", couronné l'an dernier par le prix Femina, Riss est un survivant.
Le livre, coédité par Actes Sud et les éditions des Échappés (320 pages, 21 euros), ne redonnera pas vie aux disparus. Mais il permet de ne pas oublier que le 7 janvier 2015, en une minute et quarante-neuf secondes, douze personnes ont perdu la vie. Les dessinateurs Cabu,Charb, Honoré, Tignous et Wolinski, la psychanalyste Elsa Cayat, l'économiste Bernard Maris, le policier Franck Brinsolaro qui assurait la protection de Charb, le correcteur Mustapha Ourrad ainsi que Michel Renaud, Frédéric Boisseau et Ahmed Merabet ont été fauchés par des tirs de kalachnikovs.
Blessé d'une balle à l'épaule, Riss se souvient de sa première nuit terrifiante à l'hôpital. "J'étais convaincu que les tueurs étaient à la recherche des blessés pour les achever". "Il n'était pas nécessaire de s'endormir pour faire des cauchemars. Il suffisait de rester éveillé".
"Il est impossible d'écrire", soutient Riss car "on ne transmet pas une désagrégation". Pourtant, avec abnégation, beaucoup de courage et une écriture magistrale (on se demande pourquoi ce livre ne figure dans aucune sélection des prix littéraires), Riss parvient à démentir cette affirmation trop péremptoire.